BIVAAG : le blog

Biodiversité Insulaire Vertébrée, floristique et malacologique Ancienne de l’Archipel de Guadeloupe

Une Amazone à Marie-Galante

par Arnaud, le 07 septembre 2013

Cet os est à peine plus long qu’un centimètre. Il a pourtant beaucoup de choses à dire.

Il s’agit d’une dernière phalange  de patte d’oiseau, ou griffe. Cette griffe se caractérise par une forte courbure et un sillon marqué servant à l’insertion des tendons. Ce schéma est celui d’une patte capable d’enserrer fortement une branche, capacité propre aux oiseaux arboricoles tels que les pics ou les coucous.

La dimension de cette griffe cependant, est celle d’un oiseau d’assez grande taille, du gabarit d’une buse par exemple. Et aucun oiseau de forêt aussi grand n’existe aujourd’hui en Guadeloupe. Cet os serait-il celui d’un oiseau disparu ?

Si l’on considère un peu plus dans le détail cette phalange, on relève une facette articulaire complexe associée à une proéminence marquée en face plantaire, l’ensemble indiquant une capacité d’articulation du doigt qui témoigne d’une possibilité de préhension. L’ensemble de ces caractères se rencontre par exemple chez les Psittacidés, oiseaux grimpeurs mais, aussi, capables de tenir dans leur patte les objets dont ils se saisissent.

La comparaison de cette griffe à celles d’un Ara confirme cette hypothèse : cet os est morphologiquement identique à celle du quatrième doigt d’un Ara. Elle est cependant plus petite d’environ deux-tiers.  Cette proportion nous renvoie dans la gamme des Amazones, dont on sait par les récits des chroniqueurs qu’elles étaient présentes en Guadeloupe aux XVII et XVIIIe siècles.

L'archipel aurait ainsi abrité une espèce propre, l’Amazona violacea, nommée au XIXe siècle sur la base des descriptions qu’en a fait le père Labat. Cette espèce endémique de la Guadeloupe aurait été assez proche de l’Amazone impériale qui existe encore aujourd’hui à la Dominique.

Trouvé dans l’une des cavités de Marie-Galante, cet os témoignerait donc de la présence d'une amazone sur l'île.

Des os d’Amazone ont déjà été identifiés à Marie-Galante. Ils sont issus du site archéologique de Folle Anse, à Grand Bourg. Trouvés parmi d’autres restes archéologiques dans un dépotoir amérindien, ils n’indiquent cependant pas que cet oiseau était naturellement présent sur l’île car les Amérindiens qui les capturaient et les consommaient, pouvaient les transporter d’îles en îles.

Cet os, en revanche, est issu d’un site où les ossements se sont accumulés sans intervention humaine.  Il provient, en outre, des niveaux supérieurs datés du début de la colonisation de l’île. Il montrerait ainsi que des Amazones étaient naturellement présentes à Marie-Galante au XVIIe-XVIIIe siècle.

Ces conclusions ne pourront toutefois être validées que lorsque ce reste aura été comparé à ceux d’une Amazone. Mais l’ostéothèque du projet n’en dispose pas. Espérons ici que les éleveurs de Perroquet que nous avons contactés nous permettent de recueillir un tel spécimen à l’avenir.